
7 - Protection sanitaire du réseau public contre les retours d'eau
Nota : les articles du site www.eauxpotables.com sont rattachés à la législation luxembourgeoise et tracent les grandes lignes de l'approche luxembourgeoise en matière d'alimentation en eau potable.
Les pollutions accidentelles du réseau de distribution public par retour d'eau sont encore très fréquentes. Ces événements constituent un risque sanitaire évident pour la santé du consommateur. Les deux causes hydrauliques principales du phénomène de retour d'eau sont d'une part la dépression dans le réseau public (coupure de l’eau, forte consommation en eau, ouverture d’un hydrant, rupture d’une canalisation) avec pour conséquence possible le siphonage, et d'autre part la contre pression (mise sous pression d'une installation interne).
Les installations privées de distribution ne doivent pas pouvoir perturber le fonctionnement de l’infrastructure d’approvisionnement collective auquel elles sont raccordées ou engendrer une contamination de l'eau distribuée dans les réseaux intérieurs. Les réseaux intérieurs de distribution d'eau potable ne peuvent en aucun cas être alimentés par une eau issue d'une autre ressource, soit-elle potable, brute ou pluviale. Le règlement de fourniture d'eau devra conditionner l'utilisation d'une autre ressource en eau par l'abonné au contrôle des ouvrages de prélèvement et des installations intérieures par les agents du service.
Toute installation privée portant préjudice à la qualité de l’eau doit être rendue conforme dans les plus brefs délais aux dispositions de la réglementation en vigueur. Les exploitants de ressources privées sont notamment à aviser par circulaire de l’interdiction formelle d’une connexion directe avec l’installation de distribution privée raccordé au réseau public et de l’obligation de conformer leur installation à l’article 15 du règlement grand-ducal du 7 octobre 2002. En outre, le règlement de fourniture d'eau doit expressément interdire aux consommateurs de transférer dans une autre propriété tout ou une partie de l’eau pour éviter la création d’un circuit parallèle au réseau de distribution public. En l'absence de mise en oeuvre de mesures de protection nécessaires, les autorités communales doivent pouvoir procéder à la fermeture du branchement d'eau.
En détail, les règlements communaux relatifs à la fourniture d’eau potable doivent faire obligation aux abonnées :
- de protéger l’infrastructure d’approvisionnement collective contre tout risque de retour d’eau contaminée ;
- de séparer physiquement l’installation privée de distribution raccordée à l’infrastructure d’approvisionnement collective et celle approvisionnée par une ressource d’approvisionnement privée en eau potable, brute ou pluviale.
Liste des installations privées à risque de contamination bactériologique ou chimique :
- réseaux alimentés par une ressource d’approvisionnement privée en eau potable, brute ou pluviale (contaminations bactériologiques) ;
- réseaux techniques tels que les réseaux d’arrosage ou d’incendie (phénomènes de stagnation prolongée) ;
- réseaux agricoles (risque de stagnation et de contaminations bactériologiques) ;
- réseaux dont le rythme d’exploitation est lié aux vacances scolaires (écoles) ou à la saison touristique (hôtels, campings) (risque de stagnation) ;
- réseaux dont l’exploitation est liée à des activités manipulant des substances polluantes (viticulteurs, agriculteurs, abattoirs, industries, décharges, stations d’épuration, laboratoires, hôpitaux).
Un éventuel retour d’eau contaminée pourra avoir des conséquences considérables sur l’ensemble de l’infrastructure d’approvisionnement publique. Pour éviter toute mésaventure, les branchements particuliers à risques sont à équiper d’un ensemble de protection sanitaire constitué par :
- une vanne d’arrêt,
- un dispositif antipollution agréé EN 1717 adapté à la
nature du risque déterminée et régulièrement entretenu par du personnel qualifié (les directives en vigueur stipulent que les dispositifs de protection du réseau public doivent être vérifiés et entretenus au moins une fois par an et remplacés tous les 5 ans),
- un robinet de prise d’échantillon et de désinfection.
Les règlements de fourniture d’eau doivent préciser les conditions de mise en place de ces dispositifs de protection sanitaire, les prescriptions techniques applicables à ces dispositifs ainsi que les modalités de vérification d'entretien. Il convient de préciser qu'il appartient aux propriétaires des installations intérieures de mettre en place et d'entretenir les dispositifs de protection. En revanche, l'installateur est tenu de livrer une installation conforme aux règles de l'art et aux dispositions réglementaires en vigueur. Propriétaires et installateurs peuvent donc être recherchés en responsabilité lorsqu'une pollution survient par défaut de protection.
Soulignons que l'eau usée de même que l'eau de pluie sont classées dans la catégorie à risque la plus élevée (eau ou fluide présentant un danger microbiologique ou viral). Toute communication directe, même temporaire, entre l'installation privée approvisionné par l'eau de pluie et celle alimentée par le réseau public est formellement interdite. Les règlements prescrivent une séparation physique entre les deux installations ; l'apport d'eau potable doit se faire par surverse dans un bac de disconnection qui ne peut en aucun cas être court-circuité. La citerne de récupération des eaux pluviales fait généralement office de bac de disconnection. Dans ce cas, la citerne doit être équipée d'un trop-plein et le tuyau d'amenée d'eau potable ne doit en aucun cas être immergé dans l'eau stockée (risque de siphonage d'eau polluée) ; une hauteur de sécurité minimale de 20 cm est prescrite.
Il convient également de souligner qu'à l'inverse d'un disconnecteur (« Rohrtrenner »), un clapet de non-retour (« Rückflussverhinderer ») permet uniquement d’éviter une circulation inverse de celle désirée et ne constitue aucune protection contre la prolifération de substances dangereuses dans le réseau amont. En tout état de cause, tout branchement particulier est à équiper pour le moins d'un clapet de non retour type EA EN 1717.
En ce qui concerne les parcs à bétail, signalons que les réseaux agricoles, du fait de leur mode d’exploitation, présentent un triple danger pour la salubrité de l’eau distribuée par le réseau public auquel ils sont raccordés et qu’ils sont à équiper d’un dispositif de protection sanitaire :
- les abreuvoirs représentent de possibles sources d’ensemencement bactériologique ou viral,
- l’écoulement de l’eau n’est pas assuré avec risque de stagnation prolongée,
- le réseau chômant en période hivernale est remis en service sans désinfection préalable.
Dans le contexte des phénomènes de retour d’eau, rappelons que l’opérateur lui-même peut également être rendu responsable d’une pollution accidentelle. En effet, en cas de baisse de pression, un réseau mal entretenu peut induire des infiltrations d’eau contaminée au droit des fuites. Ce risque est même patent aux points hauts du réseau, dans les regards à ventouse ne disposant d’un système efficace pour l’évacuation des eaux d’infiltration, où l’inondation du regard conduit inévitablement à l’entrée d’eau dans le réseau par siphonage. Afin de diminuer le risque de contamination d’eau, il s’agit donc également de limiter dans la mesure du possible les coupures d’eau et de rechercher et réparer systématiquement les fuites dans le réseau.
Et profitons également du présent contexte des règlements de fourniture et des coupures d’eau pour recommander d’adopter des dispositions relatives à la limitation et à l'interruption de la fourniture d’eau. Tout d’abord, les autorités communales sont bien évidemment dispensées de l’obligation d’informer les abonnées avant toute interruption de la fourniture d’eau si la gravité de la situation impose une mise hors service immédiate du réseau. En cas de limitation ou d'interruption de la fourniture d'eau, d'un changement de la pression ou de la nature de l'eau, par suite d'une pénurie d'eau, de perturbations techniques, de travaux urgents, de dispositions administratives ou d'autres événements imprévisibles, les abonnés n'ont en outre droit ni à une remise de prix, ni à un dédommagement. Enfin, il y a lieu de notifier que les autorités communales peuvent restreindre l’utilisation pour certains usages aux fins d’assurer la continuité du service de distribution.
L'aide-mémoire pour l'analyse des risques et le
guide de conception d'un réseau d'eau potable fournissent des informations complémentaires.